Philippe AJUELOS, Chef de la mission des achats, SAAM-achat, Service de l’action administrative et de la modernisation – Secrétariat général

Philippe AjuelosLa rédaction d’ACP Formation : L’organisation d’un service achats repose sur des études clés et une segmentation des portefeuilles. Pourriez-vous nous en dire plus ?

Philippe AJUELOS : L’organisation d’un service achats devrait être construite en cohérence avec les besoins de la structure pour laquelle elle a été conçue. Le besoin varie d’une structure à l’autre. Il existe des organisations qui achètent de tout en petites quantités, d’autres concernées par peu de segments d’achats, mais pour des montants élevés. De la même façon, certaines vont être concernées par des achats industriels, d’autres presque exclusivement par des achats informatiques, de logistiques ou de travaux.

Il existe plusieurs modèles actuellement qui tous concourent à la spécialisation sur un domaine d’achat. Dans la sphère publique, vous avez l’expression d’acheteur famille, empruntée au secteur privé, qui a fait son apparition très rapidement après celle d’acheteur public, qui, elle, est très récente en réalité.

Si je comprends la démarche, que je trouve dans certains cas nécessaire au regard des besoins de certains services, je ne suis pas favorable à sa généralisation. En effet, le modèle ne correspond pas à la réalité des structures achats dans le secteur public qui sont composées pour la grande majorité de peu de personnes. Vous êtes confrontés à la réalité en matière de ressources et de compétences. Donc, le modèle qui consiste à séparer « achats informatiques », « achats logistiques » et « travaux » est très souvent inopérant faute de moyens.

Mais au-delà, il me semble plus opportun de faire monter en compétence les acheteurs et les prescripteurs sur les dossiers et maintenir une activité pluridisciplinaire de l’acheteur, même si on constate une spécialisation par affinités. En évoquant cela, je pense que je vais choquer certains de vos lecteurs mais ils doivent prendre en compte le contexte particulier de la grande majorité des acheteurs publics.

Cette faiblesse peut devenir une force. En effet, la diversité des dossiers est un atout pour les acheteurs qui peuvent intervenir sur un spectre plus large et proposer des solutions d’achats auxquelles ils n’auraient pas pensé en étant spécialisé.

À mon sens, une structure achats doit comporter les processus de direction, opérationnel et de support et proposer un service aux prescripteurs allant de la formalisation du besoin jusqu’à l’exécution du marché. Dans ce cadre, il faut séparer les activités au regard des métiers intervenant dans le processus achat : une structure hébergeant les acheteurs, une autre les experts juridiques, économiques et une troisième les gestionnaires financiers des marchés.

La rédaction d’ACP Formation : Souvent la rationalisation des achats est synonyme de maîtrise des coûts. Pensez-vous que le facteur prix soit un élément déterminant dans l’acte d’achat et, à votre avis, quels sont les écueils à éviter ?

Philippe AJUELOS : Si l’on respecte le principe selon lequel tout acheteur doit définir avec précision son besoin avant tout appel à la concurrence ou avant toute négociation, si le dossier de consultation matérialise réellement cet objectif, si les réponses des opérateurs sont pertinentes et en tout cas conformes aux contraintes exposées, alors, en théorie et en théorie seulement, le prix devrait être le seul élément discriminant.

Dans la mesure où l’ensemble de ces facteurs ne sont pas toujours réunis, et au regard de l’objet du marché, il me semble difficile a priori d’ériger en critère discriminant le critère prix. La pondération du critère prix est évidemment un message clair envoyé aux opérateurs économiques. Certains diront, en effet, que la « surpondération » du prix se fait au détriment de la qualité. Cela peut arriver. Mais, il faut tempérer ces propos. Cela peut être le cas uniquement si le cahier des charges n’est pas précis quant aux exigences de qualité.

Un conseil : les acheteurs doivent impérativement s’assurer du message qu’ils veulent faire passer et décider de la bonne pondération.

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